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le choix des hypothèses

astrologues du moyen âge et de la Renaissance : « On ne saurait douter, dit Cardan[1], de l’influence exercée par les astres ; c’est une action occulte qui régit toutes les choses périssables ; et cependant certains esprits malhonnêtes et ambitieux, bien plus impies qu’Erostrate, osent la nier… Ne voyons-nous pas que, même parmi les substances terrestres, il en est, comme l’aimant, dont les qualités exercent des actions manifestes ?… Pourquoi refuserions-nous de telles actions au Ciel, corps éternel et très noble ?… Par sa grandeur, par la quantité de lumière qu’il répand, le Soleil est le principal dominateur de toutes choses. La Lune vient après, pour les mêmes raisons, car elle nous paraît le plus grand astre après le Soleil, bien qu’il n’en soit pas réellement ainsi. Elle domine surtout les choses humides, les poissons, les eaux, les moelles et le cerveau des animaux ; et, parmi les racines, l’ail et l’oignon qui renferment surtout de l’humide. »

Kepler même, qui s’élève avec tant de force contre les prétentions injustifiées de l’Astrologie judiciaire, ne craint pas d’écrire[2] : « L’expérience prouve que tout ce qui contient de l’humidité se gonfle quand la Lune croît et s’affaisse quand la Lune décroît. »

Kepler se vante[3] d’être le premier qui ait renversé cette opinion selon laquelle le flux serait l’effort des eaux de la mer pour s’unir aux humeurs de la

  1. Hieronymi Cardani De rerum varietate libri XVII, 1. II, c. xiii ; Basileæ, 1557.
  2. Joannis Kepleri De fundamentis Astrologiæ, Pragæ, 1602 ; thesis XV — J. Kepleri Opera omnia, t. I, p. 422.
  3. J. Kepleri Notae in librum Plutarchi de facie in orbe Lunæ, Francofurti, 1634. — J. Kepleri Opera omnia, t. VIII, p. 118.