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le choix des hypothèses

à l’aimant : » Donnons maintenant, dit Gilbert[1], la raison de cette coïtion et de ce mouvement qui émeut toute la nature… C’est une forme substantielle spéciale, particulière, appartenant aux globes primaires et principaux ; c’est une entité propre et une essence de leurs parties homogènes et non corrompues, que nous pouvons appeler forme primaire, radicale et astrale ; ce n’est pas la forme première d’Aristote, mais cette forme spéciale par laquelle le globe conserve et dispose ce qui lui est propre. Dans chacun des globes, dans le Soleil, dans la Lune, dans les astres, il y a une telle forme ; il y en a une aussi dans la Terre ; elle constitue cette véritable puissance magnétique que nous appelons la vigueur primaire. Il y a donc une nature magnétique qui est propre à la Terre, et qui, par une raison première et bien digne d’exciter notre étonnement, réside en chacune de ses parties véritables… Il y a dans la Terre une vigueur magnétique qui lui est propre, comme il y a une forme substantielle dans le Soleil et une dans la Lune ; la Lune dispose les fragments qui s’en détacheraient, d’une manière lunatique, d’accord avec sa forme et les limites qui lui sont imposées ; un fragment du Soleil se porte vers le Soleil, comme l’aimant à la Terre ou à un autre aimant, par son inclination naturelle et comme s’il était alléché. »

Ces pensées sont éparses dans le livre de Gilbert sur l’aimant ; amplement développées, elles prennent une importance dominante dans l’écrit sur le système du Monde qu’il avait composé et que son frère publia

  1. Gilbert : Loc. cit., p. 63.