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le choix des hypothèses

Galilée va plus loin encore et, au système copernicain, transporte la doctrine d’Albert de Saxe. Définissant, en son célèbre écrit : Della Scienza meccanica, le centre de gravité d’un corps, il dit : « C’est aussi ce point qui tend à s’unir au centre universel des choses graves, c’est-à-dire à celui de la Terre » ; et cette pensée le guide lorsqu’il formule ce principe : Un ensemble de corps pesants se trouve en équilibre lorsque le centre de gravité de cet ensemble se trouve le plus près possible du centre de la Terre.

La Physique copernicaine consistait donc essentiellement à nier la tendance de chaque élément vers son lieu naturel et à substituer à cette tendance la sympathie mutuelle des parties d’un même tout, cherchant à reconstituer ce tout. Vers le temps où Copernic invoquait cette sympathie pour expliquer la gravité particulière à chaque astre, Fracastor en formulait la théorie générale[1] : Lorsque deux parties d’un même tout se trouvent séparées l’une de l’autre, chacune d’elles envoie vers l’autre une émanation de sa forme substantielle, une species qui se propage dans l’espace intermédiaire ; par le contact de cette species, chacune des parties tend vers l’autre partie, afin qu’elles se réunissent en un seul tout ; ainsi s’expliquent les attractions mutuelles des semblables, dont la sympathie du fer pour l’aimant est le type.

À l’exemple de Fracastor, la plupart des médecins et la plupart des astrologues (il était bien rare qu’on ne fût pas à la fois l’un et l’autre) invoquaient volontiers

  1. Hieronymi Fracastorii De sympathia et antipathia rerum, liber unus (Hieronymi Fracastorii Opera omnia ; Venetiis, MDLV).