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la structure de la théorie physique

effet de les séparer, qu’elles tendent à se réunir lorsque quelque violence les a disjointes. Le semblable attire donc son semblable. Voilà pourquoi l’aimant attire l’aimant.

Le fer, d’ailleurs, et ses minerais sont parents de l’aimant ; aussi, lorsqu’on les place au voisinage d’un aimant, la perfection de l’Univers veut qu’ils aillent se joindre à ce corps ; voilà pourquoi leur forme substantielle se trouve altérée au voisinage de l’aimant, pourquoi ils acquièrent la vertu magnétique, par laquelle ils se précipitent vers l’aimant.

Tel est, au sujet des actions magnétiques, l’enseignement unanime de l’Ecole péripatéticienne et, particulièrement, d’Averroës et de saint Thomas.

Au xiiie siècle, ces actions sont étudiées de plus près ; on constate que tout aimant possède deux pôles, que les pôles de noms contraires s’attirent, mais que les pôles de même nom se repoussent ; en 1269, Pierre de Maricourt, plus connu sous le nom de Petrus Peregrinus, donne de ces actions une description[1] qui est une merveille de clarté et de sagacité expérimentale.

Mais ces nouvelles découvertes ne font que confirmer, en la précisant, la doctrine péripatéticienne ; si l’on brise une pierre d’aimant, les deux faces de la cassure ont des pôles de noms contraires ; les formes substantielles des deux fragments sont telles que ces fragments

  1. Epistola Petri Peregrini Maricurtensis ad Sygerum de Foucaucourt militem, de magnete ; actum in castris, in obsidione Lucerœ, anno Domini MCCLXIX, viii die Augusti. — Imprimé par P. Gasser à Augsbourg en 1558. Réimprimé dans Neudrucke von Schriften und Karten über Meteorologie und Erdmagnetismus, herausgegeben von Professor Dr G. Hellmann. N° 10, Rara Magnetica (Berlin, Asher, 1896).