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la théorie physique et l’expérience

gnement, le géodésien qui relève une direction au moyen des pinnules de son alidade, l’astronome qui définit l’orientation des étoiles sur lesquelles il raisonne par l’axe optique de sa lunette. Cependant, un jour vint où l’on se lassa d’attribuer à quelque cause d’erreur les effets de diffraction observés par Grimaldi, où l’on se résolut à rejeter la loi de la propagation rectiligne de la lumière, à donner à l’Optique des fondements entièrement nouveaux ; et cette audacieuse résolution fut, pour la théorie physique, le signal de progrès merveilleux.


§ IX. — Des hypothèses dont l’énoncé n’a aucun sens expérimental.

Cet exemple, et ceux que l’histoire de la Science nous permettrait d’y joindre, nous montrent que nous serions fort imprudents de dire, au sujet d’une hypothèse communément admise aujourd’hui : « Nous sommes certains que jamais nous ne serons conduits à l’abandonner par une expérience nouvelle, quelque précise qu’elle soit. » Cependant, cette affirmation, M. H. Poincaré n’hésite pas à l’émettre[1] au sujet des principes de la Mécanique.

Aux raisons déjà invoquées pour prouver que ces principes ne peuvent être atteints par un démenti expérimental, M. H. Poincaré en joint une qui paraît encore plus convaincante : non seulement ces principes

  1. H. Poincaré : Sur les principes de la Mécanique (Bibliothèque du Congrès international de Philosophie. III. Logique et Histoire des Sciences. Paris, 1901 ; pp. 415, 491).