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la théorie physique et l’expérience

comme hors de doute les autres propositions par lui invoquées. Mais cette confiance ne s’impose pas de nécessité logique ; rien n’empêche de regarder comme exacte la proposition de F.-E. Neumann et de faire porter le poids de la contradiction expérimentale à quelque autre proposition de l’Optique communément admise ; on peut fort bien, comme l’a montré M. H Poincaré, arracher l’hypothèse de Neumann aux prises de l’expérience de M. O. Wiener, mais à la condition de lui abandonner en échange l’hypothèse qui prend la force vive moyenne du mouvement vibratoire pour mesure de l’intensité lumineuse ; on peut, sans être contredit par l’expérience, laisser la vibration parallèle au plan de polarisation, pourvu que l’on mesure l’intensité lumineuse par l’énergie potentielle moyenne du milieu que déforme le mouvement vibratoire.

Ces principes ont une telle importance qu’il ne sera peut-être pas inutile de les appliquer à un second exemple ; choisissons encore une expérience regardée comme une des plus décisives de l’Optique.

On sait que Newton a imaginé une théorie des phénomènes optiques, la théorie de l’émission. La théorie de l’émission suppose la lumière formée de projectiles excessivement ténus, lancés avec une extrême vitesse par le Soleil et les autres sources lumineuses ; ces projectiles pénètrent tous les corps transparents ; de la part des diverses portions des milieux au sein desquels ils se meuvent, ils subissent des actions attractives ou répulsives ; très puissantes lorsque la distance qui sépare les particules agissantes est toute petite, ces actions s’évanouissent lorsque les masses entre lesquelles elles s’exercent s’écartent sensiblement. Ces