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la structure de la théorie physique

y a au moins une erreur ; mais où gît cette erreur, c’est ce qu’elle ne nous dit pas. Le physicien déclare-t-il que cette erreur est précisément contenue dans la proposition qu’il voulait réfuter et non pas ailleurs ? C’est qu’il admet implicitement l’exactitude de toutes les autres propositions dont il a fait usage ; tant vaut cette confiance, tant vaut sa conclusion.

Prenons, par exemple, l’expérience imaginée par Zenker et réalisée par M. O. Wiener ; pour prévoir la formation de franges dans certaines circonstances, montrer que ces franges ne se produisaient pas, M. O. Wiener n’a pas fait usage seulement de la proposition célèbre de F.-E. Neumann, de la proposition qu’il voulait réfuter ; il n’a pas seulement admis que, dans un rayon polarisé, les vibrations étaient parallèles au plan de polarisation ; il s’est servi, en outre, des propositions, des lois, des hypothèses, qui constituent l’Optique communément acceptée ; il a admis que la lumière consistait en vibrations périodiques simples ; que ces vibrations étaient normales au rayon lumineux ; qu’en chaque point, la force vive moyenne du mouvement vibratoire mesurait l’intensité lumineuse ; que l’attaque plus ou moins complète d’une pellicule photographique marquait les divers degrés de cette intensité ; c’est enjoignant ces diverses propositions, et bien d’autres qu’il serait trop long d’énumérer, à celle de Neumann, qu’il a pu formuler une prévision et reconnaître que l’expérience démentait cette prévision ; si, selon M. Wiener, le démenti s’adresse à la seule proposition de Neumann, si, seule, elle doit porter la responsabilité de l’erreur que ce démenti a mise en évidence, c’est que M. Wiener regarde