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l’expérience de physique

ries ; il a minutieusement étudié et décrit l’appareil dont il a fait usage ; il a éliminé les causes d’erreur systématiques ou en a corrigé les effets ; ce n’est pas encore assez pour que nous puissions accepter le résultat de son expérience. Les propositions abstraites et mathématiques que les théories font correspondre aux faits observés ne sont pas, nous l’avons dit, entièrement déterminées ; aux mêmes faits peuvent correspondre une infinité de propositions différentes, aux mêmes mesures une infinité d’évaluations s’exprimant par des nombres différents ; le degré d’indétermination de la proposition abstraite, mathématique, par laquelle s’exprime le résultat d’une expérience, c’est ce que l’on nomme le degré d’approximation de cette expérience. Il nous faut connaître le degré d’approximation de l’expérience que nous examinons ; si l’observateur l’a indiqué, il nous faut contrôler les procédés par lesquels il l’a évalué ; s’il ne l’a pas indiqué, il nous le faut déterminer par nos propres discussions. Opération complexe et infiniment délicate ! L’appréciation du degré d’exactitude d’une expérience exige, en premier lieu, que l’on apprécie l’acuité des sens de l’observateur ; les astronomes essayent de fixer ce renseignement sous la forme mathématique de l’équation personnelle ; mais cette équation participe bien peu de la constance sereine de la Géométrie, car elle est à la merci d’une migraine ou d’une digestion pénible. Cette appréciation exige, en second lieu, que l’on évalue les erreurs systématiques que l’on n’a pu corriger ; mais après que l’on a fait des causes de ces erreurs une énumération aussi complète que possible, on est certain d’en avoir omis infiniment