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la structure de la théorie physique

Ainsi, tant qu’il s’est agi seulement de lire la déviation de l’aimant, nous avons touché et regardé un certain assemblage de cuivre, d’acier, d’aluminium, de verre, de soie, reposant, par trois vis calantes, sur une certaine console d’un certain laboratoire sis à la Faculté des Sciences de Bordeaux, au rez-de-chaussée ; mais ce laboratoire où le visiteur ignorant de la Physique peut entrer, cet instrument que l’on peut examiner sans connaître un mot d’Électromagnétisme, lorsqu’il s’est agi d’achever l’expérience en interprétant les lectures faites, en appliquant la formule de la boussole des tangentes, nous les avons abandonnés ; nous leur avons substitué l’assemblage d’un champ magnétique, d’un axe magnétique, d’un moment magnétique, d’un courant circulaire doué d’une certaine intensité, c’est-à-dire un groupement de symboles auxquels les théories physiques donnent seules un sens, qui sont inconcevables à ceux qui ignorent l’Électromagnétisme.

Donc, lorsqu’un physicien fait une expérience, deux représentations bien distinctes de l’instrument sur lequel il opère occupent simultanément son esprit ; l’une est l’image de l’instrument concret qu’il manipule en réalité ; l’autre est un type schématique du même instrument, construit au moyen de symboles fournis par les théories ; et c’est sur cet instrument idéal et symbolique qu’il raisonne, c’est à lui qu’il applique les lois et les formules de la Physique.

Ces principes permettent de définir ce qu’il convient d’entendre lorsqu’on dit que l’on accroît la précision d’une expérience en éliminant les causes d’erreur par des corrections appropriées ; nous allons voir, en