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l’expérience de physique

on augmente de tant de volts la force électromotrice de telle pile. Il est bien vrai que l’initié, que celui qui connaît les théories de la Physique, peut traduire cet énoncé en faits, peut réaliser l’expérience dont le résultat est ainsi exprimé ; mais, chose remarquable, il peut la réaliser d’une infinité de manières différentes. Il peut exercer la pression en versant du mercure dans un tube, en faisant monter un réservoir plein de liquide, en manœuvrant une presse hydraulique, en enfonçant dans l’eau un piston à vis. Il peut mesurer cette pression avec un manomètre à air libre, avec un manomètre à air comprimé, avec un manomètre métallique. Pour apprécier la variation de la force électromotrice, il pourra employer successivement tous les types connus d’électromètres, de galvanomètres, d’électrodynamomètres, de voltmètres ; chaque nouvelle disposition d’appareils lui fournira des faits nouveaux à constater ; il pourra employer des dispositions d’appareils que le premier auteur de l’expérience n’aura pas soupçonnées et voir des phénomènes que cet auteur n’aura jamais vus. Cependant, toutes ces manipulations, si diverses qu’un profane n’apercevrait entre elles aucune analogie, ne sont pas vraiment des expériences différentes ; ce sont seulement des formes différentes d’une même expérience ; les faits qui se sont réellement produits ont été aussi dissemblables que possible ; cependant la constatation de ces faits s’exprime par cet unique énoncé : la force électromotrice de telle pile augmente de tant de volts lorsque la pression augmente de tant d’atmosphères.

Il est donc clair que le langage par lequel un physicien exprime les résultats de ses expériences