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CHAPITRE IV

L’EXPÉRIENCE DE PHYSIQUE[1]

§ I. — Une expérience de Physique n’est pas simplement l’observation d’un phénomène ; elle est, en outre, l’interprétation théorique de ce phénomène.


Le but de toute théorie physique est la représentation des lois expérimentales ; les mots vérité, certitude, n’ont, au sujet d’une telle théorie, qu’une seule signification ; ils expriment la concordance entre les conclusions de la théorie et les règles établies par les observateurs. Nous ne saurions donc pousser plus avant la critique de la théorie physique, si nous n’analysions l’exacte nature des lois énoncées par les expérimentateurs, si nous ne marquions avec précision de quel genre de certitude elles sont susceptibles. D’ailleurs, la loi de Physique n’est que le résumé d’une infinité d’expériences qui ont été faites ou qui pour-

  1. Ce chapitre et les deux suivants sont consacrés à l’analyse de la méthode expérimentale telle que l’emploie le physicien ; à ce sujet, nous demandons au lecteur la permission de fixer quelques dates. Nous pensons avoir le premier formulé cette analyse en un article intitulé : Quelques réflexions au sujet de la Physique expérimentale (Revue des Questions scientifiques, deuxième série, t. iii,1894). M. G. Milhaud prit l’exposé d’une partie de ces idées pour sujet de son cours en 1895-96 ; il publia, en nous citant d’ailleurs, un résumé de ses leçons sous ce titre : La Science rationnelle (Revue de Métaphysique et de Morale, 4e année, 1896, p. 290. — Le Rationnel, Paris, 1898). La même analyse de la méthode expérimentale a été adoptée par M. Edouard Le Roy, au 2e article de son écrit : Science et Philoso-