Page:Duhem - La Théorie physique, 1906.djvu/213

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
203
les qualités premières

symbole avait conduit Poisson à édifier une théorie mathématique qui représentait de la façon la plus heureuse les lois expérimentales établies par Coulomb.

Ne pouvait-on ramener les lois nouvellement découvertes à cette qualité, dont l’introduction en Physique était déjà un fait accompli ? Ne pouvait-on pas expliquer les attractions et les répulsions qui s’exercent entre deux fils, dont chacun ferme une pile, en admettant que certaines charges électriques sont convenablement distribuées à la surface de ces fils ou à leur intérieur, que ces charges s’attirent ou se repoussent en raison inverse du carré de la distance, selon l’hypothèse fondamentale qui porte la théorie de Coulomb et de Poisson ? Il était légitime que cette question fût posée, qu’elle fût examinée par les physiciens ; si quelqu’un d’entre eux était parvenu à lui donner une réponse affirmative, à réduire les lois des actions observées par Ampère aux lois de l’Électrostatique établies par Coulomb, il eût rendu la théorie électrique sauve de la considération de toute qualité première autre que la charge électrique.

Les tentatives pour réduire aux actions électrostatiques les lois des forces qu’Ampère avait mises en évidence se multiplièrent tout d’abord ; Faraday, en montrant que ces forces pouvaient donner naissance à des mouvements de rotation continue, coupa court à ces essais ; en effet, aussitôt qu’Ampère connut le phénomène découvert par le grand physicien anglais, il en comprit toute la portée. Ce phénomène, dit-il[1],

  1. Ampère : Exposé sommaire des nouvelles expériences électrodynamiques, lu à l’Académie le 8 avril 1822. (Journal de Physique, t. XCIV, p. 65.)