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la structure de la théorie physique

cette température, puisque je possède le thermomètre sur lequel elle est lue.

Ainsi, de même qu’une grandeur n’est point définie simplement par un nombre abstrait, mais par un nombre joint à la connaissance concrète d’un étalon, de même l’intensité d’une qualité n’est pas entièrement représentée par un symbole numérique ; à ce symbole doit être joint un procédé concret propre à obtenir l’échelle de ces intensités. Seule, la connaissance de cette échelle permet de donner un sens physique aux propositions algébriques que nous énoncerons touchant les nombres qui représentent les diverses intensités de la qualité étudiée.

Naturellement, l’échelle qui sert à repérer les diverses intensités d’une qualité est toujours quelque effet quantitatif ayant pour cause cette qualité ; on choisit cet effet de telle sorte que sa grandeur aille en croissant en même temps que la qualité qui le cause devient plus intense. Ainsi, dans un réservoir de verre qu’entoure un corps chaud, le mercure subit une dilatation apparente ; cette dilatation est d’autant plus grande que le corps est plus chaud ; voilà un effet quantitatif qui fournira un thermomètre, qui permettra de construire une échelle de températures propre à repérer numériquement les diverses intensités de chaleur.

Dans le domaine de la qualité, la notion d’addition n’a point de place ; elle se retrouve au contraire lorsqu’on étudie l’effet quantitatif qui fournit une échelle propre à repérer les diverses intensités d’une qualité. On ne saurait ajouter entre elles diverses intensités de chaleur ; mais des dilatations apparentes d’un liquide en un récipient solide se peuvent ajouter les unes aux