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ble de connaître relativement aux mouvements célestes, aux distances et aux grandeurs des corps célestes ; et, jusqu’aujourd’hui, toutes ces prévisions se sont montrées exactes, ce qui n’arriverait pas si ce point de départ était faux ; car, en toute matière, une erreur petite au début devient grande à la fin.

« Tout ce qui apparaît dans les cieux est d’accord avec ce procédé, tandis que cela contredit au précédent. Comme, d’ailleurs, il est nécessaire de s’en tenir aux vérités d’observation qui ont été précédemment énumérées, il faut bien accorder aussi l’exactitude de ce procédé, et cela par la même nécessité qui nous contraint d’admettre les mouvements célestes en toute la nature. En faveur de quelques raisons sophistiques, nier ce qui est plus certain que toute raison, cela est absurde ; c’est sottise semblable à celle de ces anciens qui, en vertu de quelques sophismes, niaient le mouvement, et toute espèce de changement, et la pluralité des êtres, toutes choses dont la fausseté et la contradiction sont manifestes à notre sens. Ces choses-là, en effet, ne sauraient être démontrées, pas plus que l’on ne peut démontrer que le feu est chaud, ni que toute existence implique la substance et l’accident ; c’est le sens qui nous assure qu’il en est ainsi. Aussi le Philosophe déclare-t-il que nous connaissons ces choses avec plus de certitude qu’aucune raison n’en saurait donner ; et il ajoute qu’il ne saurait convenir d’en chercher des raisons ; car tout raisonnement de notre part présuppose le sens. »

Si nombreuses et si précises qu’aient été les confirmations qu’une théorie a reçues de l’expérience, jamais les hypothèses qui portent cette théorie n’acquièrent la certitude des vérités de sens commun ; ce serait grave erreur que de le penser, et Frère Bernard de Verdun se montrait fort naïf en adoptant cette opinion ; pour en tenir une semblable à notre époque, après que l’histoire a vu crouler tant de théories longtemps admises sans conteste, il faudrait une naïveté plus grande encore ; combien de nos contemporains, cependant, et qui se croient esprits forts, accordent aux théories scientifiques la confiance déraisonnable que leur donnait l’humble franciscain du xiii siècle !