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pressé de traduire » l’ouvrage d’Ibn-al-Haitam. Les agencements d’orbes solides que cet ouvrage proposait, en développant d’ailleurs une pensée de Simplicius, allaient fournir des modèles mécaniques du système de Ptolémée, et, par là, contribuer grandement à assurer le triomphe de ce système parmi les Chrétiens d’occident. Les hypothèses développées en ce traité n’allaient pas tarder, cependant, à être attaquées au nom des principes de la Physique, et cela précisément parce qu’elles avaient prétendu représenter la nature des choses.

On peut, en effet, regarder les hypothèses de l’Astronomie comme de simples fictions mathématiques que le géomètre combine afin de rendre les mouvements célestes accessibles à ses calculs ; on peut y voir aussi la description de corps concrets, de mouvements réellement accomplis. Dans le premier cas, une seule condition est imposée à ces hypothèses, celle de sauver les apparences ; dans le second cas, la liberté de celui qui les imagine se trouve beaucoup plus étroitement limitée ; s’il est, en effet, l’adepte d’une philosophie qui prétende connaître quelque chose de la céleste essence, il lui faudra mettre ses hypothèses d’accord avec les enseignements de cette philosophie.

Ptolémée et les penseurs hellènes qui sont venus après lui ont adopté, au sujet des hypothèses astronomiques, la première de ces deux opinions. Ils ont pu, dès lors, sans souci des diverses Physiques dont ils disputaient entre eux ou avec leurs contemporains, composer leurs théories géométriques ; ils ont pu choisir leurs suppositions sans se mettre en peine de rien, si ce n’est de l’accord entre les résultats de leurs calculs et les données des observations.

Au contraire, avec Thâbit ibn Kourrah, avec Ibn-al-Haitam, les astronomes arabes ont voulu que les hypothèses qu’ils formulaient correspondissent à des mouvements véritables de corps solides ou fluides réellement existants ; dès lors, ils ont rendu ces hypothèses justiciables des lois posées par la Physique.

Or la Physique professée par la plupart des philosophes de l’Islam était la Physique péripatéticienne, la Philosophie