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au sujet de ces choses célestes ; car d’hypothèses différentes on tire les mêmes conclusions relatives aux mêmes objets ; parmi ces hypothèses, il en est qui sauvent les phénomènes au moyen des épicycles, d’autres au moyen des excentriques, d’autres au moyen des sphères dénuées d’astres et tournant à contre-sens[1]

« Les dieux, assurément, ont un plus sûr jugement ; mais pour nous, il faut nous contenter d’atteindre seulement l'à peu près de ces choses ; car nous sommes des hommes,… en sorte que nous parlons selon la vraisemblance et que les discours que nous tenons ressemblent à des fables. »

L’Astronomie donc ne saisit point l’essence des choses célestes ; elle en donne seulement une image ; cette image même n’est point exacte, mais seulement approchée ; elle se contente d’à peu près. Les artifices géométriques qui nous servent d’hypothèses pour sauver les mouvements apparents des astres ne sont ni vrais, ni vraisemblables. Ce sont de pures conceptions que l’on ne saurait réaliser sans formuler des absurdités. Combinés dans l’unique but de fournir des conclusions conformes aux observations, ils ne sont point déterminés sans ambiguïté. Des hypothèses fort différentes peuvent conduire à des conséquences identiques qui sauvent également les apparences. D’ailleurs, ces caractères de l’Astronomie ne doivent pas étonner. Ils marquent simplement que la connaissance de l’homme est bornée et relative, que la science humaine ne saurait rivaliser avec la science divine. Telle est la doctrine de Proclus.

Elle est bien loin, certes, de l’ambitieuse Physique qui, au Περὶ Ούπανοῦ et en la Métaphysique, prétend spéculer si profondément sur l’essence des choses célestes qu’elle parvienne à fixer les principes essentiels de l’Astronomie.

Par plus d’un point, il serait permis de la rapprocher du Positivisme ; dans l'étude de la Nature, elle sépare, comme le Positivisme, les objets qui sont accessibles à la connais-

  1. Il s’agit ici des ἀναλίττουσαι σφαῖραι considérées par Eudoxe, par Calippe et par Aristote.