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vements ; ce qui s’y trouve cède avec indifférence aux mouvements naturels de chacun des astres et les laisse passer, bien que ces mouvements se produisent en des sens opposés ; en sorte que tous les astres peuvent passer, et que tous peuvent être aperçus, au travers de tous les fluides qui sont répandus d’une manière homogène. »

Malgré la concision de cet exposé, nous y percevons nettement la doctrine que Ptolémée professe touchant les hypothèses astronomiques.

Les diverses rotations sur des cercles concentriques ou excentriques, sur des épicycles, qu’il faut composer pour obtenir la trajectoire d’un astre errant sont des artifices combinés en vue de sauver les phénomènes à l’aide des hypothèses les plus simples qui se puissent trouver. Mais il faut bien se garder de croire que ces constructions mécaniques aient, dans le Ciel, la moindre réalité. L’orbe de chacun des astres errants est rempli d’une substance fluide qui n’oppose aucune résistance au mouvement des corps qu’elle baigne. Au sein de cette substance, l’astre décrit sa trajectoire plus ou moins compliquée sans qu’aucune sphère solide le guide en sa marche. Tout en professant une théorie astronomique plus savante, Ptolémée se réclame d’une Physique toute semblable à celle de Cléanthe. Il n’a cure des critiques que Dercyllide, Adraste d’Aphrodisie et Théon de Smyme adressaient à cette Physique.

L’attitude de Ptolémée à l’égard du théorème d’Hipparque marque nettement la rupture avec les principes dont se réclamaient Adraste et Théon. Le mouvement du Soleil est également sauvé soit que l’on fasse décrire à cet astre un cercle excentrique au Monde, soit qu’on le fasse tourner sur un épicycle dont le centre demeure toujours à la même distance du centre de l’Univers. De ces deux hypothèses, quelle est celle qu’une saine Physique commande d’adopter ? Selon Adraste et Théon, c’est l’hypothèse de l’épicycle, car un mécanisme formé de sphères solides emboîtées les unes dans les autres permet alors de figurer la marche du Soleil. Selon Ptolémée[1] « il est plus raisonnable de s’at-

  1. Claude Ptolémée, Composition mathématique, livre III, ch. IV ; éd. Halma, t. I, pp. 183-184.