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croupi au milieu d’autres arabes magnifiques. En ce temps-là, ils avaient des bottes de cuir carminé et de majestueux manteaux rouges. Ils demeuraient assis en rond, contemplant, du fond de leurs turbans, l’immensité de la boue abreuvée par le ciel d’Artois. Aujourd’hui, ces gens-là portent le casque d’ocre et montrent une silhouette de guerrier sarrasin.

Le goumier venait de mourir, frappé au ventre par son gracieux cheval blanc.

Il y avait à l’ambulance un infirmier musulman, sorte de négociant cossu, engagé volontaire. Oh ! en lui, rien que d’européen, de parisien même ; mais, dans la barbe grise et frisée, un sourire charnu, plein de malice, et ce regard particulier des gens qui sont de l’autre côté de la Méditerranée.

Rachid « fit très bien les choses ». Il avait retrouvé des mots de son pays pour soigner le moribond et lui avait prodigué les consolations qu’il faut aux gens de par là.

Quand le goumier fut mort, il disposa le suaire lui-même, à sa façon ; puis il alluma une cigarette et se mit en peine de trouver Monet et Renaud.

Faute de place, l’ambulance, alors, n’avait pas