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Sous les sabots, la neige s’attache et s’amasse. Comme il ferait bon jouer à un jeu… Mais nous sommes pleins d’une fatigue qui ressemble à de l’exaspération. Nous irons jusqu’au bout de la pelouse.

Voici la grande fosse où fument et pourrissent les débris des pansements, tous les résidus de l’infection. Plus loin ! voici les pins musiciens, que vient visiter, chaque soir, une lanterne à la main, pour y chasser les passereaux, Dalcour le mineur, Dalcour le zouave terrible que personne n’empêchera de promener à travers la pluie sa jambe roide et son crâne largement ouvert sous les bandes…

Allons jusqu’au mur du cimetière, que le temps a fait enfler comme une protubérance au flanc du parc, et qui est si providentiellement proche.

Dans l’ombre, le vieux château garde une imposante figure. À toutes les fenêtres, ce soir, luisent doucement des lampes. On dirait un navire silencieux et illuminé dont l’étrave fend la banquise. Rien ne sort de là, si ce n’est cette lueur muette. Rien ne trahit la nature de l’affreuse cargaison.

Nous savons que, dans toutes les chambres, à tous les étages, au ras de tous les planchers, de