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grande bataille et les résultats d’un remaniement de la carte d’Europe.

Entendez : Grégoire me dit qu’il va périr… Je pense, j’espère qu’il se trompe. Mais il n’en mourra pas moins si l’on ne prend pas sur soi de le faire souffrir. Il mourra, car tout le monde l’abandonne. Et il y a longtemps qu’il s’est lui-même abandonné.


*


— Mon cher, explique Auger à un infirmier très prétentieux, c’est sans doute désagréable de n’avoir qu’un soulier à mettre, mais ça permet de faire des économies. Et puis, maintenant, j’ai moitié moins de chances que toi d’égratigner ma femme, dans le lit, avec mes ongles de pied…

— Parfaitement, appuie le sergent, avec Mariette il la caresse, pour ainsi dire, sa dame.

Auger et le sergent rigolent comme deux bons compères. L’infirmier, un peu confus, ne trouve rien à objecter et s’éloigne en riant par convenance.

Je m’assieds auprès d’Auger et nous demeurons seuls.