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C’est un gros registre dont on lui a fait cadeau et sur lequel il note les choses importantes de sa vie…

Auger a une grosse écriture ronde d’écolier. Oh ! il sait juste écrire pour ses besoins, et je dirai presque pour son plaisir.

— Voulez-vous regarder mon cahier ? dit-il.

Et il me le tend, de l’air d’un homme qui n’a pas de secrets.

Auger reçoit beaucoup de lettres, et les recopie soigneusement, surtout quand elles sont belles et empreintes de sentiments généreux. Son lieutenant, par exemple, lui a écrit une remarquable lettre.

Il copie aussi sur son cahier les lettres qu’il écrit à sa femme et à sa fillette. Puis on y voit les faits du jour : « Pansement à dix heures du matin. Le pus diminue… Visite, après la soupe, de madame la Princesse Moreau qui distribue des polos à tout le monde ; j’en ai un beau vert ! Le petit homme qui avait si tellement mal au ventre est mort à deux heures… »

Auger referme son cahier et le place sous son polochon.

Il a une figure qu’on ne peut pas regarder sans