Un jour, un porc destiné à notre alimentation fut tué dans la porcherie par des éclats d’obus. On le mangea, et un infirmier ayant trouvé des morceaux de métal dans sa portion de viande, ce fut l’occasion de nombreuses plaisanteries.
Pendant quinze jours, il nous fut impossible de sortir de l’ambulance. Notre plus grande promenade était d’aller jusqu’au terrain vague où l’on avait établi un cimetière que les obus menaçaient de labourer. Ce cimetière prenait une extension considérable. Comme il faut huit heures de travail pour qu’un homme creuse la tombe d’un homme, une équipe nombreuse devait piocher tout le jour afin d’assurer une place à chaque cadavre.
Quelquefois, nous passions par la baraque de bois où l’on avait installé la morgue. Le père Duval, le plus vieux de nos infirmiers, y travaillait tout le jour à coudre des suaires de grosse toile, assis en face de tous « ses morts ».
Ils étaient rangés par terre, côte à côte, et soigneusement ensevelis, les pieds joints, les mains croisées sur la poitrine, quand ils possédaient encore des mains et des pieds… Duval s’occupait