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préparer l’avenir

Notre émigration fut une faute immense insensée, irréparable. Il faut l’admettre et en tirer une leçon plutôt que des larmes qui ne guérissent rien. Sous peine d’anéantissement total de notre rare, nous devons mettre un terme à l’aveuglement des individus, à l’inertie des sociétés nationales, à la nullité gouvernementale qui ont rendu possible cette atroce dispersion, pire que celle des Acadiens. Notre plus grand persécuteur ce n’est ni Murray, ni Craig, ni Durham, ni celui-ci, ni celui-là, c’est nous-mêmes, les exécuteurs de cette abominable déportation qui démembre nos familles aussi sûrement que le grand dérangement acadien de jadis.

La proportion de notre race a toujours baissé au Canada : en 1901, nous formions encore 30,71% de la population ; en 1911, nous tombons à 28,51%. Nous serions 55% si nos gens étaient restés au pays. De 1901 à 1911, la population totale du Canada s’est accrue de 34%, nous n’avons gagné que 24%. Il nous faut garder toutes nos forces chez nous si nous voulons surnager dans la marée montante.

De tous côtés on prédit un saut énorme de l’immigration après la guerre : il y aura vingt millions de Canadiens dans le temps de le dire, prétend le Star de Montréal, et S. A. R. le duc de Connaught dans son discours d’adieu nous recommandait de choisir cette multitude d’immigrants en Grande-Bretagne pour que le Canada demeure bien britannique. Que pourrons-nous opposer aux navires pleins d’Anglais et aux convois pleins d’Américains sinon, comme toujours, nos rangées de berceaux ?

Ils ont besoin d’être nombreux, ces berceaux, et solides ! Nos hygiénistes montent la garde auprès des frêles bercelonnettes des villes, tant mieux ! Mais ce sont les vigou-