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pas ici des milliers de colons américains non-naturalisés, qui se sont enfuis et décampent encore avec tant de presse que notre gouvernement a jugé bon de leur assurer que la conscription ne les frapperait jamais, eux. On ne compte plus les terres abandonnées. Déjà, en 1916, le Canada, n’avait semé en blé que 10,085,000 acres au lieu de 12,986,000 en 1915, et en bien des endroits la récolte s’est mal faite par manque de moissonneurs ; 1917 s’annonce encore plus mal : on a semé 18.3 % de moins de blé d’automne que l’an dernier.

Les agriculteurs se lamentent sur la pénurie de garçons de ferme, et cependant le vide grandit sans cesse : départ des enrôlés, désertion de ceux qui ne veulent pas s’enrôler. Il faut des soldats, il faut des fermiers. On semble vouloir sacrifier ceux-ci : la production diminue et diminuera bien davantage, en dépit de tous les discours, si nous laissons émigrer nos gens, si nous les exilons nous-mêmes.

ce qu’on doit faire

D’abord, il faut absolument bloquer le coulage, enrayer la désertion des terres en rassurant avec vigueur les paysans contre la conscription. Un Belge du Manitoba l’écrivait récemment : « Enrôler le paysan — et encore plus le laisser déserter — ce serait tuer la poule aux œufs d’or ; ce serait tuer la production rurale, non-seulement en hommes, mais en aliments, si nécessaires à l’Angleterre qui n’a presque plus de paysans… Ce serait affamer les villes, ce serait enfin tuer le pays en tuant le paysan. Notre devise doit être : Ne touchez pas au paysan ! Hands off the farmers !  »

Il n’est pas séditieux, croyons-nous, de constater que pour produire il faut des producteurs, et que pour produire davantage, il faut toujours plus de producteurs, cultivant plus grand de terre ou plus intensément une étendue moin-