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Les gelées tardives de 1815 jettent la province dans la détresse : pas de grain, pas de pommes de terre. Le gouverneur-général, Drummond, prie Mgr Plessis de recueillir les informations sur la disette, en vue de fournir des secours directs (déjà !) à même les approvisionnements des troupes. Sur cent-quatre réponses reçues, treize paroisses, de Montréal-Richelieu ont du grain à vendre ; quarante, surtout de la région des Trois-Rivières, en ont assez pour vivre et pour semer ; vingt-quatre, d’un peu partout, ne pourront vivre et semer que difficilement ; enfin vingt-sept, presque toutes des paroisses nouvelles, dans Montcalm, la Beauce et à partir de Cacouna, n’ont déjà plus rien en février. C’est cet hiver-là que M. de Calonne payait le blé cinq piastres pour soutenir ses pauvres. En 1787-88 aussi, il avait fallu se serrer la ceinture et manger du son et des racines, c’est-à-dire des patates sauvages.

Deux autres calamités : l’inondation de 1865, qui donna le coup de mort au village du Grand-Machiche ; et celle de 1896, la grande-digue, où l’eau monta tellement que les cultivateurs d’en bas déménageaient le bétail sur des radeaux, et qu’on canotait par-dessus des garde-fous du pont du Moulin et dans la maison Mailhot : le piano des Bellemare était fixé au plafond.

c — Anciens usages

Inutile de dire que les vieilles coutumes canadiennes ont existé chez nous : sur le perron d’église, la vente pour les morts et la criée d’objets perdus ; le brayage du lin et le foulage de l’étoffe ; le maquignonnage et l’amour des chevaux ; les corvées de bâtiments ou de creusage de puits à brimbale ; et les cotillons, le goût du petit coup, les charivaris et la fringale d’éloquence. Oh, la politique ! elle va si fort, qu’en 1858, Monseigneur Baillargeon fait signer une pétition des paroisses au gouverneur Head pour qu’il passe une nouvelle loi électorale : « Vos pétitionnaires ont appris avec douleur que les dernières élections ont été accompagnées de fraudes, de violences, de parjures et d’assassinats. Chaque élection voit s’accroître et s’étendre cet esprit de désobéissance aux lois divines et humaines. Les