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Cette force de nos gens n’a pas à moitié servi à développer notre province : elle s’est gaspillée aux Voyages du Nord-Ouest, aux chantiers et aux défrichements du Vermont, du Michigan, des Illinois, des Dakotas, du Minnesota et même du lointain Orégon… Il faut lire les exploits des lurons de la région des Trois-Rivières dans Les Canadiens de l’Ouest de Jean Tasse ; les fondations de villes américaines : Chicago, Peoria, Duluth, Dubuque, St-Louis et autres, où toute la misère a été pour nous et tout le profit pour les autres. C’est classique. Depuis Jean Nicolet et Pierre Pépin-Laforce, découvrant l’un le Michigan, l’autre le Minnesota, jusqu’au Napoléon des plaines, F.-X. Aubry, les hommes forts et entreprenants de Batiscan à Maskinongé ont fait l’étonnement des badauds plutôt que la grandeur de leur pays.

Si ce merveilleux trésor d’énergies s’était exploité chez nous, à conquérir le sol, à créer des paroisses, à donner du corps et du territoire à notre race, quelle glorieuse continuation de notre valeur militaire ainsi lancée à démolir la forêt, à étendre les frontières nationales !

b — L’hommage au Seigneur

Une vieille coutume française un peu militaire, un peu civile, ramenait, chaque premier jour de mai, la plantation d’un mai devant la porte principale de la maison du seigneur. C’était un joyeux hommage, une partie de plaisir, ainsi qu’on peut le lire dans Les Anciens Canadiens de M. de Gaspé.

Un simple sapin écorcé blanc jusqu’au bouquet, surmonté d’un bâton rouge orné d’une girouette ; un rassemblement de censitaires armés ; une délégation de vieillards qui demandent au seigneur la permission de planter le mai ; une prière à Dieu pour qu’il n’arrive pas d’accident ; la descente au ralenti du pied de l’arbre dans la terre ; offrande au noble du mai et d’un gobelet de rhum : « Plairait-il à notre seigneur d’arroser le mai avant de le noircir ? » — libations fraternelles, cris de Vive le Roi ! Vive le seigneur ! coups de fusil et poudre brûlée pour noircir le mât, feu d’artifice et déjeuner de tous au Manoir, telle