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VERS LES SOMMETS

trouvait en sa présence. Mais elle était d’une nature si indépendante et si peu expansive que personne ne voyait, lui le premier, la flamme d’amour qui jaillissait, ardente et vive. Elle aussi était dupe. Attribuant l’indifférence, voire même la froideur, du jeune homme pour elle à sa passion pour l’étude, elle ne lui savait pas mauvais gré d’une attitude aussi anormale.

— Une fois cette ferveur refroidie, disait-elle, l’autre, la dévotion pour moi, naîtra. C’est alors que je m’empresserai de lui dire mon brûlant amour.

Pour le moment, elle se contentait d’épier l’évolution de l’état moral du jeune homme, comme un médecin suit un malade qu’il veut sauver à tout prix. À la moindre alerte, au moindre éloignement, elle agirait ferme. S’il ne l’aimait pas encore, elle était certaine qu’il n’avait pas donné son cœur à une autre. Elle était sûre d’être la première femme dans sa vie, quel que fût le rôle qu’il le lui faisait jouer. Elle surveillait en préparant ses batteries sentimentales.

Quelquefois, elle se sentait incapable de cacher plus longtemps son amour, de ne pas le lui exprimer avec tout son être. Mais elle craignait de l’effaroucher, de le perdre à jamais. En attendant de