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VERS LES SOMMETS

était-il capable de concevoir cette monstrueuse chose ? Aussi vécut-il une affreuse semaine de cauchemar ! Sur son visage basané et ridé, des sueurs d’agonie coulèrent ! Il voyait venir le jour sombre où il lui faudrait nécessairement se prononcer ! Il était très malheureux ! Mais pouvait-il tourner le dos à son jeune maître ? Pouvait-il tourner le dos au parti qu’il avait adoré ? Cette alternative le plongeait dans l’angoisse ! Un heureux miracle se produisit, qui le sortit d’embarras. L’affection qu’il avait pour Jules l’emporta… Ses sentiments politiques étaient tellement changés qu’il ne voyait et ne jurait plus que par le candidat indépendant. Pour le renseigner de son mieux, il consacrait ses heures de loisir et ses veilles à la recherche des nouvelles. Il réussissait comme pas un. C’est qu’il avait une manière bien à lui de faire parler les gens, le vieux père « Ben ». Aucun receleur de secrets ne pouvait pas ne pas être pris à ses pièges.

Comme on le croyait toujours ardent pour le parti qu’il avait si ostensiblement idolâtré toute sa vie, et « hostile en son for intérieur », comme il avait soin de dire, au candidat « incolore », on le recevait dans le camp adverse, et conséquemment, on le tenait dans le secret des dieux. Chaque jour il était donc en mesure de vider sur la table du bureau du