Page:Dufour - Le Testament de Jean-Jacques Rousseau, 1907.djvu/17

Cette page a été validée par deux contributeurs.
13

universelle Thérèse Le Vasseur, ma gouvernante, voulant que tout ce qui m’appartient, de quelque nature et en quelque lieu qu’il soit, même mes livres et papiers et le produit de mes papiers, lui appartienne comme à moi-même, et bien fâché de ne pouvoir[1]payer d’une manière plus avantageuse et plus digne de son zèle vingt ans de services, de soins et d’attachement, qu’elle[2]m’a consacrés[3].

J’exclus de ma succession tous mes parens, en quelque degré qu’ils soient, notamment les deux plus proches, savoir Susanne Gonceru, née Rousseau[4], ma tante, et Gabriel Rousseau[5], mon

  1. pas reconnoître.
  2. a passés près de moi.
  3. Avant comme après son testament, Jean-Jacques se demandait souvent ce que deviendrait Thérèse, une fois seule. Voy. les Confessions, livres XI, XII, et les lettres des 23 décembre 1761, 1er et 25 août 1763, 15 décembre 1763, 24 janvier 1765, 23 février et 31 mai 1766, 25 juillet 1768 (Œuvres, t. IX. p. 12, 69 ; t. X, p. 292-293 ; t. XI, p. 81, 82, 85, 107, 202, 313, 347 ; t. XII. p. 88)
  4. Susanne Rousseau, née le 13 février 1682, avait plus de 48 ans lorsqu’elle épousa, à Genève, le 24 août 1730 (contrat du 8 août, Minutes de Marc Fornet, notaire, vol. XLIX, fol. 102v°-103r°), Isaac-Henri Goncerut, fils de feu Louis, en son vivant châtelain de Crassier et bourgeois de Nyon. Elle vécut jusqu’au 11 novembre 1774. Son mari, baptisé le 29 octobre 1683, était un peu plus jeune, et Jean-Jacques n’avait pas oublié ce détail (Confessions, livre I ; Œuvres, t. VIII, p. 3). Le 29 janvier 1768, alors qu’Isaac Goncerut était mort depuis dix-neuf mois (28 juin 1766), il le croyait encore vivant (Œuvres, t. XII, p. 56).

    Jean-André De Luc, qui avait fait un séjour à Môtiers, du 22 ou 23 novembre au 7 décembre 1763, écrivit de Genève à J.-J. Rousseau, le 13 décembre, pour le remercier de son hospitalité. Sa longue missive contient ce passage : « J’ai eu l’honneur de remettre moi-même votre lettre [lettre inconnue] à Made Gonceru : elle pleura de joie en entendant prononcer votre nom, en voyant votre lettre et en écoutant la lecture qu’elle me pria de lui en faire. Elle s’étoit flattée de voir encore une fois son cher neveu et d’apprendre de lui la vérité de bien des choses qui le concernent et qui lui etoient parvenues très défigurées. J’ai suppléé à une partie de ce qui lui rendoit l’absence et le silence de ce neveu fort affligeans ; mais elle ne se console qu’avec peine de ce qu’elle comprend bien que probablement elle ne le reverra plus. Malgré son grand âge, elle continue à faire seule ses affaires, tant au dedans qu’au dehors de la maison, mais Mr  Gonceru ne sort presque plus. » (Mss. de la Bibl. de Neuchâtel.)

  5. Gabriel Rousseau, orfèvre, né en 1715, mort en 1780 sans postérité,