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comme l’amour, qui reste le même, sincère et fécond quel que soit le visage, nègre ou anémique, peau-rouge ou citron, quelles que soient la mode, la morale, la race, la classe, etc., seul il (l’idéal de l’Inconscient en évolution continue vers la conscience) est fondé à admettre tout idéal dans le temps et l’espace, la Junon de la villa Ludovisi comme les Beauties préraphaélites de Burne–Jones et de Maddox Brown, l’Hercule Farnèse comme les dandies Byroniens lithographies par Deveria, une Japonaise d’Okousaï comme une fleur de maquillage de Degas, l’équilibre grec comme le soi-disant contre-nature moderne ; — seul il ne sait ce que d’autres appellent décadence et peut confondre ceux qui, avec MM. Taine et Renan, proclament arts morts désormais l’architecture, la sculpture et la poésie et annoncent le règne unique de la science pure, ce qui ne veut rien dire ; — enfin son principe est l’anarchie même de la vie : laissez faire, laissez passer ; ne sachons que nous enivrer des paradis sans fond de nos sens et fleurir sincèrement nos rêves sur l’heure qui est à nous ; l’Inconscient souffle où il veut, le génie « saura reconnaître les siens », et le parfum unique qui doit naître de tous ces riches gaspillages anonymes d’un jour, en naîtra sublimé selon l’infaillible loi et montera vers les templa serena de l’acquis à l’Inconscient. »

Certes, le nu n’est pas toute la sculpture. Le vêtement n’est que pour le sculpteur malhabile un obstacle à l’interprétation des lignes, aux rythmes divers du mouvement. — Mais concédons que l’artiste doive dépouiller son personnage d’un costume sujet aux