Page:Dufay - L’Impôt Progressif sur Le Capital et le Revenu, 1906.djvu/102

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sont même élevés à 24 000 fr. parce que le travail rural et industriel avait subi une dépréciation considérable. On n’attend pas que la misère ait dispersé la famille et l’ait mise hors de combat dans la lutte pour la vie ; on la soutient afin de l’empêcher de succomber. Je ne crois pas qu’aucune commune rurale française présente un seul exemple de ce cas. On vient de constater, au contraire, ainsi que l’a rappelé M. Drumont, que, dans plus de 40 départements, la situation économique des familles agricoles est réduite à un état déplorable.

Si on voulait continuer cette comparaison au point de vue moral, notre système fiscal ne ferait guère meilleure figure. La désertion des campagnes, qui en est la suite inévitable, jette sur le pavé des grandes villes un nombre toujours plus grand de ces enfants de familles agricoles qui ne trouvent plus à y vivre, même modestement. Garçons et filles, a l’envi, abandonnent ces champs qui, autrefois, nourrissaient leurs ancêtres et leur créaient une aisance et une indépendance qui satisfaisaient leurs modestes besoins. Cette surabondance de population dans les grandes villes amène cet avilissement des salaires, si bien décrit par M. Benoist qui compte, à Paris seulement, plus de trois cent mille jeunes filles obligées de vivre, si elles veulent rester honnêtes, avec un budget de 600 fr. par an, dont 0,90 et même seulement 0,65 par jour pour la nourriture. Il ne s’agit plus seulement de faire de grandes phrases sur la dépravation des mœurs et la dépopulation des campagnes ; il serait moins facile, j’en conviens, mais plus efficace, de faire cesser l’une des causes les plus actives de cette corruption.