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intéressantes, la conservation des monuments. Pas le moins du monde ; je veux, au contraire, propager, populariser, multiplier les collections. Quand le riche, l’archi-millionnaire épris de ces choses rares, en aura collectionné pour des millions dont, en définitive, il jouit seul, peut-être s’arrêtera-t-il devant l’abus et l’excès : là encore l’impôt progressif sera une digue salutaire. D’autres moins riches et plus nombreux pourront, à leur tour, se procurer aussi quelques-unes de ces merveilles. Avec un impôt de 1 ‰ et une collection de 100.000 francs on paiera 95 francs, déduction faite des premiers 5.000, et pour 1.000.000, à 2 ‰ on paiera 1.995 francs et en augmentant ainsi à 3, 4 ‰ par chaque million, on arrivera sans doute à arrêter la manie du collectionneur, car à ces chiffres là, le goût artistique n’est plus le seul mobile. Il faut considérer, du reste, que, dans un grand nombre de cas, ces amateurs deviennent des spéculateurs acquérant souvent des fortunes considérables, avec plus de plaisir et moins de peine que nos laboureurs avec leurs champs, les armateurs, avec leurs vaisseaux, les industriels avec leurs produits, lesquels sont écrasés d’impôts.

Là encore la progression ne produira qu’un effet bienfaisant ; en diminuant l’accumulation de ces sortes de richesses en quelques mains, elle aidera à les distribuer entre un plus grand nombre d’amateurs sérieux qui répandront autour d’eux le goût de ces choses d’art qui développent et ornent l’intelligence.

Il en est de ceci, comme de la richesse sous la forme terre ou capitaux : en arrêtant, par la progression de l’impôt, nos collectionneurs de millions et de centaines de millions dans leurs entreprises d’accaparement, on ne supprime pas la richesse ; on la fait profiter au