Page:Dufay - L’Impôt Progressif en France,1905.djvu/556

Cette page a été validée par deux contributeurs.

On ne peut pas indéfiniment ajourner les réformes indispensables. Assez de discours, assez de décorations : verba et decoramenta, præterea nihil. Nos masses laborieuses demandent une nourriture plus substantielle.

Pourquoi attendre ? Les scandales qui éclatent sans cesse dans le monde des financiers, des agioteurs, des mercanti, des exploiteurs, des usuriers célèbres, des chevaliers d’industrie à la poursuite des millions et des milliards ne sont-ils pas suffisants ? Faut-il que cette marée montante submerge le pays tout entier avant que le législateur songe à mettre un frein par l’impôt à ces immorales accumulations de richesses qui ruinent le travail honnête tout en faisant souvent le désespoir et la mort de ceux qui les forment ? Faut-il rappeler ici cette page du grand moraliste qui a peint si éloquemment, il y a deux siècles, les premières manifestations de notre décadence ? « Il y a des âmes sales, pétries de boue et d’ordure, éprises du gain et de l’intérêt, comme les belles âmes le sont de la gloire et de la vertu ; capables d’une seule volupté, qui est celle d’acquérir ou de ne point perdre ; curieuses et avides du denier dix, uniquement occupées de leurs débiteurs, toujours inquiètes sur le rabais, ou sur le décri des monnaies, enfoncées et comme abîmées dans les contrats, les titres et les parchemins. De telles gens ne sont ni parens, ni amis, ni citoyens, ni chrétiens, ni peut-être des hommes : ils ont de l’argent. »

Salins, septembre 1905.


Séparateur