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M. Méline parle aussi des associations, des syndicats, des coopératives de consommation et de production. Tout cela est très bon, mais d’une efficacité douteuse si on les laisse, dans la lutte pour la vie, en rivalité et en concurrence avec ces formidables associations capitalistes qui, presqu’exemptes d’impôts, font au travail les conditions draconiennes que nous connaissons. Vous aurez beau réunir dix, cent, mille, cent mille de ces malheureux, impuissants individuellement, leur impuissance collective est la même, elle est même aggravée, elle ne peut développer en eux, comme nous le voyons quelquefois, que des idées de colère et de destruction. Avec du désordre comment faire de l’ordre ? C’est à chaque individu qu’il faut faciliter le chemin vers la propriété ou la conservation de la propriété déjà acquise, en affranchissant le travail et la petite propriété des charges qui les accablent aujourd’hui. Vous aurez beau additionner la misère avec la misère, la multiplier même avec elle-même, vous aurez toujours la même nature de produit, c’est-à-dire encore la misère. La manière de changer ce produit, ce serait associer la misère avec la richesse ; de mettre ce que les uns ont de trop avec ce que les autres ont de moins, suivant la grande pensée de Bossuet ; vous obtiendrez sans doute par là, entre ces deux extrémités du monde économique, de l’aisance au milieu, comme intermédiaire nécessaire entre les forces exagérées d’un côté et les faiblesses impuissantes de l’autre. La réforme fiscale proposée aiderait certainement à créer ce meilleur état social.

C’est ainsi que l’on ferait comprendre aux déshérités que le droit de propriété est utile à tous, et non pas à quelques-uns seulement ; que le travail est