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est mauvaise ; il n’en sait pas davantage, et cela lui suffit. Et c’est à cet homme que vous allez demander d’établir chaque année le compte exact de son revenu, comme vous le feriez à un commerçant ou à un industriel ».

Mais non, M. Méline, mille fois non ; comme tous vos confrères, avocats des millionnaires, vous commettez-là l’une de ces exagérations vraiment inacceptables. Nous avons déjà pour l’impôt foncier, pour les baux, pour les mutations par donation, par contrat de mariage ou testament ou par décès, les revenus de la terre servant de base à plusieurs impôts. Est-ce que le fisc, malgré sa cruauté naturelle, a jamais eu l’idée de tracasser à ce point les cultivateurs, de leur demander le compte exact des revenus de chaque année ? Est-ce que ce n’est pas une moyenne de ces revenus, basée peut-être sur une expérience de dix ou vingt années qui fixe ou doit fixer le montant de ces revenus ? Qu’en ce qui concerne l’impôt foncier, le chiffre immuable de ce revenu, fixé une fois pour toutes depuis quatre-vingts ans soit le plus inexact qui existe dans toute l’Europe, Turquie comprise, personne n’en doute plus, et c’est même là l’une des causes les plus actives de l’abandon de tant de terres autrefois cultivées. Vous venez d’établir que le revenu net de la terre est de 1.921 millions ; pour fixer le chiffre a-t-on tracassé jusque dans leurs cuisines les ménagères de la culture, ou l’agriculteur jusque dans son écurie pour compter et peser peut-être son bétail ? Est-ce qu’il n’est pas connu dans toutes les contrées de la France que, dans tel canton de la commune, un hectare de terre se louera par exemple 5 francs, ailleurs 10 francs, ailleurs 50 ou 100 francs.