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dité des possesseurs du capital, le droit canon n’admettait que l’association comme légitime ; en sorte que si le capital était perdu, c’est le possesseur qui subissait la perte, res perit domino. Il n’y avait donc pas prêt comme nous l’entendons aujourd’hui. Dans toutes les circonstances où le capital était perdu, ou n’avait pas produit un profit commun aux associés, si le possesseur du capital avait reçu un intérêt quelconque, il était tenu à restitution, conformément même à la loi civile qui s’était mise d’accord avec le droit canon. Et non seulement cette perception d’un intérêt illégal entraînait la restitution, elle était un péché « peccatum » et le confesseur de l’usurier avait défense d’accorder l’absolution « In articulo mortis » au pécheur qui s’était mis en contravention avec les lois divines et humaines.

À la fin du XVIIIe siècle, sous l’influence de l’école des physiocrates, des encyclopédistes, de l’esprit nouveau, du développement de plus en plus grand de la richesse mobilière, le droit civil a fini par l’emporter. En sorte qu’aujourd’hui où l’influence sociale de l’esprit du droit canon a presque disparu, notre société se trouve à peu près livrée, comme au temps du paganisme, aux exigences de la richesse concentrée de nouveau entre les mains d’une classe sociale relativement peu nombreuse. Les effets ne se sont pas fait attendre longtemps. En moins d’un siècle, le droit canon oublié, nos lois civiles ayant consacré l’usure ad duritiam cordis, il n’est guère possible d’entrevoir une limite a la confiscation universelle de la richesse par quelques-uns au détriment de tous.