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gistrature, presse, force armée, etc. Les richesses accumulées sont telles, que leurs possesseurs peuvent, à leur gré, acheter en un jour tout le blé d’une vaste région, tout le sucre d’un pays entier, la récolte de tout le café sur toute la terre ; le cuivre, l’argent, l’or, la plupart des métaux sont à leur disposition ; ils peuvent fausser le prix de toutes les choses nécessaires, le fixer à leur profit au détriment de la multitude des consommateurs. Et cela, c’est le droit de propriété dans son plus légitime emploi aux yeux de nos milliardaires qui peuvent ainsi, impunément, prélever sur le travail telle énorme portion qui leur convient. Étonnez-vous, après cela, que des esprits irrités viennent soutenir en théorie que la propriété, ainsi entendue, c’est le vol et l’assassinat.

Je l’ai remarqué souvent : c’est perdre son temps, que d’exposer ce tableau, qui demanderait cent pages pour être complet, aux yeux des représentants de notre féodalité financière. Une myopie incurable les empêche de voir au delà de ce qui les touche immédiatement. Le spectacle journalier de l’immense richesse qui les entoure, et où il est certes fort agréable de vivre sans souci, les condamne à croire que tout cela représente le vrai droit, la vraie justice. L’idée de payer un peu plus d’impôts, à mesure que la richesse progresse, leur fait imaginer des projets odieux d’expropriation universelle ; diminuer un peu ces excès de la richesse entre les mains de quelques-uns ; faciliter aux travailleurs l’accès à la propriété, cela devient de suite, pour leur frayeur, une confiscation légale ; suivant eux, c’est tuer la propriété, la famille et la société que de créer, par une législation plus sage, un plus grand nombre de petits propriétaires et