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Or voici qu’un journal, qui parle à un million de lecteurs, signalait récemment un effet assez extraordinaire du luxe que permettent les très grandes fortunes. Des milliers d’ouvrières, à Paris et dans plusieurs grandes villes, sont obligées, malgré la loi, de travailler 15 ou 18 heures de suite, pour permettre à d’autres femmes, riches celles-là, d’essayer leurs robes à minuit ou une heure du matin, à la sortie des théâtres ; car il est nécessaire de ne pas déranger pendant le jour ces heureuses capitalistes dans leurs habitudes de paresse et dans l’emploi de leur temps, consacré aux obligations mondaines. Il faut qu’un journal les signale à l’attention publique, leur reproche leur inconsciente cruauté, dont elles ne se doutent même pas, tant il est vrai que la richesse excessive a pour effet d’oblitérer même dans la femme, expression naturelle de la bonté, le simple sentiment de la justice.

Ce fait n’inspire-t-il pas cette réflexion, que la grande richesse qui permet à quelques-unes une semblable paresse, pourrait sans danger être diminuée par la progression de l’impôt, ce qui contribuerait sans doute à rétablir des rapports moins inégaux entre ces femmes placées aux deux pôles trop éloignés du monde économique. Partout, sous toutes les formes de gouvernement, la grande inégalité des conditions produira les mêmes effets : vanité, orgueil, esprit de domination, tyrannie au dessus : soumission passive et muette, dépression morale et intellectuelle, absence de liberté, parce qu’il y a absence de propriété, au bas.

Dans un autre journal, il est fait mention de revenus considérables qui, paraît-il, ne supporteraient actuellement à peu près pas d’impôts ; il s’agit de la