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Cette assemblée de citoyens compétents, indépendants, examine consciencieusement le projet sans autre souci que de le rendre acceptable par tous les groupes, grâce à l’esprit de justice qui préside à sa rédaction. Il ne s’agit donc pas de sacrifier un parti politique au profit d’un autre parti, comme on paraît le craindre en France. On fait œuvre de justice, et non pas œuvre de passion. Il s’agit, en principe, de l’impôt frappant la fortune nette de chaque citoyen, celui-ci est admis à justifier de sa fortune, si l’évaluation du fisc est exagérée, et à en déduire le passif. Il n’y a là ni inquisition indiscrète ou vexatoire, ni faveur, ni passe-droit pour personne. On arrive ainsi, autant que faire se peut, à l’équation exacte entre la fortune de chacun et sa part des charges générales. Une amende assez lourde corrige les citoyens qu’un instinct d’avarice a portés à dissimuler leur fortune ou leurs revenus.

Qu’y a-t-il d’impraticable, d’injuste, d’odieux même comme on le prétend en France, dans cette répartition si juste de l’impôt ? Est-ce qu’aujourd’hui même, au décès d’un contribuable, l’Enregistrement n’a pas les moyens d’établir à cent francs près la fortune du défunt ? par tous les actes authentiques ou sous-seing privés, par le cadastre, les hypothèques, etc. Est-il plus difficile d’arriver à cette exactitude avec un vivant qu’avec un mort ?

Or, que voyons-nous aujourd’hui (juin 1903) ? M. Rouvier, impressionné sans doute par un préjugé qu’il sait très répandu en France, fait connaître son projet d’impôts sur le revenu ; mais avec quelle timidité, quelle crainte de se buter contre le préjugé national, et surtout contre la mauvaise humeur des millionnaires et