de repartir, visant, cette fois, non seulement Voltaire lui-même, mais les Encyclopédistes et le jargon philosophique de certains d’entre eux : « Il est vrai que ces maximes ne sont point écrites dans le goût de certaines pensées modernes ; mais ce goût moderne est-il bien le vrai goût ? l’est-il exclusivement à tout autre ? les pensées de Salomon ne sont ni épigrammatiques, ni alambiquées ; il n’y prend point le ton d’oracle ; il ne s’y enveloppe point dans les ténèbres d’un style amphigourique ; le devait-il faire ? il voulait instruire et il savait que l’entortillage et l’obscurité nuisent à l’instruction. » Voltaire avait allégué, pour prouver que le Pentateuque est postérieur au Livre de sagesse, l’anachronisme suivant : « Cet auteur dit, chapitre x, qu’Abraham voulut immoler Isaac du temps du déluge. » Et le Petit commentaire de Guénée lui objecte : « Quand cet auteur aurait fait l’anachronisme que vous lui prêtez, s’ensuivrait-il qu’on n’avait pas le Pentateuque de son temps ? les bévues d’un écrivain peuvent-elles nuire à un autre ou prouver pour ou contre son antériorité ? Rappelez-vous, monsieur, un de vos meilleurs amis, M. l’abbé Nonnotte, l’homme du monde à qui vous devez le plus de reconnaissance, si la vérité vous est chère. Il vous a démontré qu’en cent endroits de votre Histoire générale vous contredites sans raison les historiens qui vous ont précédé. Ces méprises prouvent-elles que, de votre temps, on n’avait pas d’histoire de France ? »
Et enfin ce dernier trait, qui n’est pas seulement plaisant, mais qui réfute Voltaire par le genre même d’arguments par lequel Voltaire prétendait réfuter la Bible. On sait que Voltaire triomphe quand il croit avoir établi rationnellement l’impossibilité matérielle ou l’invraisemblance des faits allégués par la Bible : « Votre libéralité envers Salomon, lui dit Guénée, est étonnante. Monsieur ; vous venez de lui donner quarante mille remises, dont l’Écriture ne dit rien ; et ici vous lui faites présent de douze mille écuries pour ses douze mille chevaux de selle. Vous croyez apparemment que chaque cheval de Salomon avait son