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d’être exagérées : « la compression, a-t-on dit avec justesse, produit toujours la subtilité ; la conscience proteste et se venge, par un respect ironique, des entraves qu’on lui impose[1]. »

Ajoutons enfin que, s’il faut en croire Grimm et Diderot, l’éditeur principal de l’Encyclopédie, Le Breton avait, de son propre mouvement, supprimé ou singulièrement adouci, dans les dix derniers volumes, les passages « les plus hardis, les plus propres à exciter les clameurs des dévots[2]. »

Ce qu’il n’a heureusement pu effacer, parce qu’il aurait eu trop à faire, ce sont les nombreux et, cette fois, sincères appels à la tolérance ; les exhortations à « ne point haïr ceux qui ne pensent pas comme nous » (art. Législateur). « Opérez votre salut, s’écrie Diderot, à l’article Inquisiteurs ; priez pour le mien : tout ce que vous vous permettrez au delà est d’une injustice abominable aux yeux de Dieu et des hommes. » De tels propos indignaient ceux qui prétendaient à l’honneur de venger Dieu ; nous allons les voir maintenant se grouper, pour mieux combattre tous ces audacieux professeurs de « tolérantisme ».

  1. Renan : Averrhoès, 286. N’avait-on pas vu, au siècle passé, « Descartes dédiant ses Méditations à la Sorbonne, qui en est morte, et faisant semblant de ne pas croire au mouvement de la terre dans le moment même où il le démontre ? Leibnitz appelait cela les ruses philosophiques de M. Descartes. » (Bersot, Montesquieu. 26.)
  2. Grimm : Janvier 1771. Voir sur ces incidents : Diderot et Catherine II, par Maurice Tourneux, dans le Temps du 17 août 1885.