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AUX GLACES POLAIRES

sur ma tête ; j’ai les cheveux tout blancs… » Cette chevelure drue, épaisse, défiant notre calvitie pitoyable, est la gloire naturelle de l’Indien : c’est pourquoi le scalp de l’ennemi fut, de tout temps, le beau trophée de guerre. Et cependant, comme ils la négligent sur leurs personnes ! Abandonnée à sa croissance, elle tombe, à la gauloise, sur les oreilles et le cou jusqu’aux épaules, qu’elle ne dépasse guère, tant chez l’homme que chez la femme. Est-il besoin de mentionner qu’elle est, dès le bas-âge, le château-fort de la vermine ? Le Déné pur sang est un imberbe. Les dents blanches et richement émaillées forment une armature qui s’usera sur les durs aliments séchés, mais qui ne pâtira ni ne s’ébrèchera jamais.

Les hommes marchent, les jambes arquées, à la manière bancale, la pointe des pieds projetée en dedans. Cette tournure est le résultat voulu d’une pratique, plus facile à décrire par la parole que par la plume, à laquelle on les a soumis, petits garçons : elle donne aux membres inférieurs une élasticité infatigable pour les courses à la raquette, et une souplesse toute féline pour traquer les fauves.

Les vêtements primitifs étaient des peaux de renne, d’orignal, ou de lièvre. Les hommes s’affublaient de blouses velues, arrondies par le bas, échancrées par les côtés. Les jambes s’engageaient, jusqu’à mi-hauteur seulement, dans des tubes appelés mitasses, que retenaient des lanières assujetties à la ceinture. Une sorte de pagne sauvegardait la décence. Le reste des membres était laissé aux morsures du climat. Nos habits européens n’eurent point de sitôt raison de la coupe ancestrale : il est encore des sauvages qui s’empressent de faire sauter, le fond des pantalons neufs qu’ils achètent, pour n’en garder que les jambes, en guise de mitasses.

Les femmes portaient la même blouse que les hommes, mais très longue. La femme dénée, modèle de modestie, trouverait honteusement sauvages certaines modes de la dernière civilisation.

À l’arrivée des commerçants, les Dénés, comme les autres Indiens, abandonnèrent peu à peu leurs habits légers, chauds et imperméables pour nos lourdes étoffes tissées. Progrès déplorable. Un sauvage ne sait ni laver ni rapiécer. Ses