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LES CRIS

qu’occupèrent les Cris ne raconte-t-elle pas, du reste, avec quelle puissance ils maintinrent ail nord et au sud de leurs tribus les autres nations indiennes ?

C’est dans les guerres, dont nos premiers missionnaires virent les derniers carnages, que se déployaient les cruautés des Cris. Qui n’a lu. dans les histoires et les romans, les scènes du scalp, par lesquelles s’achevaient, au milieu des hurlements infernaux, les batailles au tomahawk ? Le récit suivant de Mgr  Laflèche, sur la méchanceté dont il trouva capables des femmes, en 1855, fait songer à ce qu’il en dut être de la méchanceté des guerriers vainqueurs :


Quelques Pieds-Noirs, s’étant approchés d’un camp de Cris pour voler leurs chevaux, furent surpris, et l’un d’eux fut blessé. À la faveur des ténèbres cependant, il réussit à se cacher dans les broussailles. Les Cris, pour ne pas laisser échapper une si belle proie, se placèrent autour et firent bonne garde toute la nuit… Quand le jour parut, chacun se mit en quête du malheureux Pied-Noir. On traverse en tous sens le petit bois…, mais sans succès… Chacun s’en retourne dans la conviction que le malheureux a réussi à s’esquiver inaperçu. Deux femmes, cependant veulent faire une dernière recherche. Elles examinent avec la plus scrupuleuse attention tout ce qui aurait pu donner abri au Pied-Noir, sans rien découvrir. Elles vont suivre l’exemple des autres, lorsqu’elles jettent un dernier regard sous un renversé qu’elles avaient examiné bien des fois, et croient y apercevoir des pieds ; elles tâtent et saisissent précisément les pieds de l’infortuné sauvage, qui avait réussi à s’enfoncer dans une espèce de cave sous les racines d’un arbre renversé. De suite, il est brutalement arraché de sa retraite, et ces deux démons féminins se mettent à l’œuvre. Pour savourer plus longtemps le plaisir de le faire pâtir, elles commencent à le déchiqueter avec des alênes, et s’amusent, en riant aux éclats, de toutes les contorsions que la force de la douleur lui fait faire. Après l’avoir ainsi tourmenté, elles se préparent à la fameuse opération de la chevelure. Le malheureux, redoutant par-dessus tout cet outrage, veut l’empêcher en protégeant sa tête de ses mains ; mais on les lui rabat à coups de couteaux, et, en un instant, les cheveux et la peau sont enlevés de la tête. Il n’y a plus qu’un crâne nu. Enfin ces furies incarnées passent à une opération plus épouvantable encore, et qui met fin aux souffrances de leur victime, en lui arrachant le dernier souffle de vie. Elles reviennent ensuite au camp, ayant autour du cou un collier sanglant de dépouilles humaines.


Que dire aussi de la mort qui attendait les pauvres hallucinés, que les Cris appellent windigos (cannibales) ! Le