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AUX GLACES POLAIRES
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toucherait toutes les lointaines extrémités, suffit à montrer quelle enceinte de liberté offre à tous les vents cette mer intérieure sans îles ni jetées.

Les eaux du Grand Lac de l’Ours, fournies par une quarantaine de rivières très pures, gardent une transparence de cristal sur leur conque granitique ; et nourrissent, dans leurs profondeurs, des réserves fabuleuses de poisson. La truite saumonée y pèse de 15 à 60 livres ; le hareng se jette par millions dans la rivière de l’Ours, unique décharge du Grand Lac. La fraîcheur constamment glaciale du lac et de la rivière bonifie encore ce poisson. La débâcle de la glace, épaisse de 7 à 12 pieds, ne s’effectue qu’à la mi-juillet, et des icebergs, que les chaleurs estivales ne parviennent jamais à fondre, errent sur le large jusqu’au regel général. Les bords du Lac de l’Ours, où les hivers, les aquilons, l’aridité semblent se coaliser pour entretenir la mort, deviennent, aux époques des passages du renne, des champs grouillants de vie. C’est pour attendre le nomade gibier qu’autour des grandes baies vont et viennent sans cesse les groupes extrêmes de toutes les tribus septentrionales : Plats-Côtés-de-Chiens, Esclaves, Peaux-de-Lièvres et Esquimaux.


Les Indiens du fort Norman, Peaux-de-Lièvres pour la plupart, Esclaves et Plats-Côtés-de-Chiens quant au reste, vivent des chasses et des pêches du Grand Lac de l’Ours, ou des bois arrosés par la rivière de l’Ours. C’est donc là que les cherchera, dans ses courses pastorales, le missionnaire de Sainte-Thérèse.


Le fort Norman lui-même se trouva, de 1864 à 1872, à l’ouest de la baie Keith, source de la rivière de l’Ours, près des ruines du fort Franklin.[1]

  1. Sir John Franklin avait bâti ce fort, pour le compte de la Compagnie du Nord-Ouest, en septembre 1825.

    L’illustre marin fit trois expéditions à la mer polaire, dans le but de trouver le passage du Nord-Ouest. La première en 1818, par la baie d’Hudson et le continent. La deuxième, en 1825, par le fleuve Mackenzie. La troisième en 1845, par la mer polaire elle-même. L’Erebus et le Terror, avec leur brillant équipage de 134 hommes, et leur capitaine, périrent sur l’île du Roi-Guillaume. Franklin mourut le 11 juin 1847, d’après un écrit retrouvé parmi les squelettes.