Page:Duchaussois - Aux glaces polaires, Indiens et Esquimaux, 1921.djvu/292

Cette page a été validée par deux contributeurs.
279
LES CASTORS

De ces seize années, il passa les treize premières dans l’isolement. De prêtres, il ne vit que le Père Collignon trois fois, et le Père Lacombe une fois, en de rapides visites qu’ils lui firent, par charité fraternelle.


Le seul ami qu’on put lui envoyer fut le Frère Thouminet.

Ancien soldat, religieux modèle, le Frère Thouminet était la ponctualité même, jointe à la bravoure, dans les soins de la mission, comme dans le soin de la perfection de son âme.


R. P. Le Doussal
Mais ses jours devaient bientôt finir. Arrivé au fort Dunvégan en 1877, il se noya le 18 août 1880, dans une anse de la rivière la Paix, en cherchant un instrument qu’il croyait avoir perdu. Il dut glisser dans l’eau, avec un pan de grève.

Le premier compagnon prêtre du Père Tissier fut le Père Le Doussal. Il n’y passa que l’année 1880-1881 ; mais il souffrit assez pour écrire :

« Ici, c’est l’étable de Bethléem. J’ai vu le fort Providence, le Grand Lac des Esclaves, le lac Athabaska, le fort. Vermillon : rien n’approche du dénuement que j’ai trouvé à Dunvégan. »


Le Père Tissier quitta ce dénuement en 1883, le laissant aux Pères Husson et Grouard, ses successeurs. Il était forcé d’aller chercher à Saint-Boniface, hôpital le plus voisin alors, le soulagement d’une infirmité horrible, qu’il avait contractée en poussant la traîne. Il emportait de Dunvégan l’affection et les regrets de tous les sauvages.

Le Père Tissier n’a point écrit. Il l’aurait pu. Il l’aurait dû. Il préféra ensevelir dans le silence de son âme et la mémoire de Dieu ses souffrances avec ses mérites. L’une