blent fuir plus loin. Mais le cri et les appâts de continuer
le charme perfide, et les orbes de se rétrécir peu à peu.
Les voici, tournoyant à 300 mètres, à 200. Déjà l’on distingue
les longs cous penchés et les yeux noirs scrutant la
terre. Un dernier demi-cercle… Le chasseur, immobile
comme les pierres contre lesquelles il s’est tapi, le doigt
sur la détente, retient son souffle. Un instant, un seul, il
le sait, sera le propice :
Un heureux couple montagnaisl’instant où les oies, descendues
assez près pour
reconnaître qu’on les a
trompées, les ailes planantes,
les pattes ballantes,
vont reprendre leur
bond vers l’espace. Les
deux coups de fusil frappent
dans la masse, et les
victimes nouvelles sont
alignées, debout, à côté
des premières. L’expérience,
qui n’instruit pas
toujours les hommes, ne
sauvera point les oies.
Toute la matinée, tout le
jour, toute la semaine
peut-être, elles reviendront
sur la sirène criante
et sur l’appât de mort.
Avec le tribut prélevé sur les oies sauvages, l’hiver sera doux au fort-de-traite et à la mission, comme sous la loge indienne, surtout si le poisson, de son côté, répond aux vœux du pêcheur.
Le Père Taché débarqua au fort Chipewyan, le 2 septembre 1847, comme la chasse aux oies battait son plein.
Les 200 chasseurs montagnais et les 15 chasseurs cris, qui se trouvaient au lac Athabaska, avec leurs familles, abandonnèrent leurs mousquets, afin de livrer leurs âmes à l’homme de la prière, pendant les quatre semaines qu’il venait passer parmi eux.