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AUX GLACES POLAIRES

À Saint-Boniface, Mgr Taché continua son rôle de sauveur des missions du Nord, en élisant Mgr Grandin pour son coadjuteur, Mgr Faraud pour vicaire apostolique de l’Athabaska-Mackenzie ; et en veillant, comme s’il eut toujours été à lui, sur le troupeau lointain, enlevé à son bercail.

Que ne dirait-on pas du prestige qu’il exerça sur la Compagnie de la Baie d’Hudson, et des diplomaties auxquelles il se plia, pour la garder tolérante à l’égard des missionnaires, malgré les inhabiletés de l’un ou l’autre de ceux-ci ?

Nous avons signalé la vraiment géniale conception des transports, par le lac la Biche.

Mgr Faraud s’étant placé lui-même à cette porte du Nord sauvage, Mgr Taché se fit son serviteur, son chargé d’affaires, à Saint-Boniface, porte de la civilisation. Ainsi furent assurées les expéditions annuelles. Il s’en remit, il est vrai, lorsqu’il put les trouver, à des hommes de grande capacité et d’inlassable dévouement, tels les Pères Bermond, Maisonneuve[1] et Poitras ; mais sans abandonner la direction générale des entreprises. Et même, durant près de vingt ans, de la mort du Père Bermond à la nomination du Père Maisonneuve, il fut, en personne, le seul procureur de « toutes les missions du Nord-Ouest ; non seulement de celles de son diocèse, mais de celles des vicariats qui en avaient été démembrés. » Rien n’était assez petit pour être négligeable, à ses yeux. Il commandait les articles, les recevait, les étiquetait, les classait par vicariat, par mission, par missionnaire, en attendant les charrettes à bœufs, dont il surveillait encore le chargement jusqu’aux minimes objets.

Le dernier prodige de sa vigilance et de sa mémoire, en faveur de l’Athabaska-Mackenzie, fut la reconstitution de

  1. Le Père Maisonneuve, dont la vie apostolique compta quarante-cinq ans, fut tué en 1893, à Saint-Boniface, dans l’accomplissement de ses fonctions de procureur de l’Extrême-Nord. Une surdité, résultant d’un excès de misère, l’empêcha d’entendre l’alarme d’une locomotive qui venait derrière lui, sur une voie ferrée où il avait eu à s’engager un moment. Frappé à la tête, il agonisa huit jours, sans recouvrer ses sens.

    Le Père Poitras succéda au Père Maisonneuve et se dépensa grandement au bien des missions, jusqu’en 1915. Il réside maintenant à Duluth, où il n’a pas fini de se dévouer.