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L’HEURE DE DIEU

Située à 60 lieues, au sud du Portage la Loche, l’Île à la Crosse était sur le passage des barges, du sud et de l’est, qui faisaient route vers le Portage. M. Thibault ne pouvait donc attendre, en plus favorable position, le moment d’exécuter son projet apostolique.

Dès qu’il lui fut possible, il quitta ses néophytes de l’Île à la Crosse et s’embarqua pour le Portage la Loche.


Il y passa les mois de juin et juillet 1845.

En attendant l’arrivée les brigades de l’Extrême-Nord, il s’y occupa des Montagnais de la région :


Tous ceux que j’ai vus de cette tribu, écrit-il à Mgr Provencher, savent prier Dieu plus ou moins bien, et connaissent les principales vérités de la religion. Ils ont un respect infini pour le missionnaire, qu’ils regardent comme Jésus-Christ lui-même.

Ils me disent que toutes les tribus, d’ici au Pôle nord, soupirent après la connaissance du Dieu vivant…


Enfin les « barges du Pôle » arrivèrent, et le missionnaire écrivit encore à son évêque :


J’ai vu, au Portage-la Loche, quelques sauvages de la rivière Mackenzie, Peaux-de-Lièvres, Loucheux, Esclaves, Plats-Côtés-de-Chiens, Castors, etc., dont les heureuses dispositions m’ont singulièrement touché. « Nous désirons, comme les Montagnais, me disent-ils, apprendre les nouvelles que tu viens apporter dans ces pays. Nous faisons pitié, car nous ne connaissons pas Dieu ; mais nous désirons le connaître, et nous voudrions aussi, quand nous mourrons, aller dans le beau pays où Dieu place les bons vivants. Viens nous voir ! Fais nous charité ! » Ma réponse affirmative les remplit de joie…


Cette connaissance de nos prières, trouvée par M. Thibault chez les Montagnais, ce respect surnaturel professé pour le missionnaire, ces aspirations de tous les sauvages connus jusqu’aux régions polaires, vers la religion du Dieu vivant, doivent être attribués, en grande part, à l’influence religieuse exercée par les Canadiens français catholiques.

Nous savons quel fut le rôle des coureurs-des-bois, comme explorateurs, et quel lot leur revient de la gloire que se sont décernée les découvreurs nommés par l’histoire. Mais nous n’avons rien dit encore de leur mérite principal, celui d’avoir préparé les conquêtes de l’Évangile, parmi les nations sauvages.