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LA LUTTE POUR LA VIE

orphelins, dix sœurs et autant de pères et frères ressentaient les premiers tiraillements de la faim.

Un soir, le Père Duport, supérieur de la mission, n’en pouvant plus d’inquiétude, alla au réfectoire, où il trouva les enfants attablés autour de petits morceaux rôtis des derniers poissons. Prenant l’air mécontent, il dit :

— Mes enfants, si nous sommes dans la misère ce n’est pas la faute de nos Frères : ils ont tout essayé ; ni de vos bonnes Sœurs : elles ont tout sacrifié pour vous. C’est votre faute, à vous !


Rennes (caribous)

Plusieurs crurent qu’on leur reprochait de trop manger et se mirent à sangloter.

— Ce n’est pas cela, reprit le Père supérieur. Si je suis fâché, très fâché, c’est que vous ne priez pas saint Joseph avec assez de ferveur. Voilà, ce que je veux dire.

Sur cette explication, tous les petits se lèvent et promettent de prier « de toutes leurs forces ».

La Sœur supérieure, mise en demeure de fixer le nombre des caribous, répond qu’il en faut cent, pas un de moins.

— Eh bien, mes enfants, à genoux !

Une nouvelle neuvaine commence, séance tenante, pour sommer saint Joseph de procurer les cent caribous.

Le surlendemain, c’était la fin des vivres.