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rage, en ces contrées de nuits si longues : la lampe à l’huile de poisson pour l’intérieur, et surtout le parchemin des misérables fenêtres pour les heures du jour.

Toutes nos missions du Nord ne connurent d’abord que ces carreaux de parchemin. C’étaient des morceaux de peaux de renne ou d’orignal, grossièrement raclés, et laissant passer à travers leur spongieuse épaisseur fort peu de clarté et beaucoup de froid. Peu à peu, des carreaux en vitres de petites dimensions les remplacèrent.

La maisonnette et l’église de Good-Hope ne connurent, durant dix-sept ans, que les parchemins.

Ce fut cependant la cinquième année de ce régime que le Père Séguin demanda qu’on lui achetât des vitres. Mais trois ans se passèrent, et rien n’arriva : ou la lettre, ou l’envoi s’étaient donc égarés. Il renouvela sa démarche, et attendit encore trois ans. Cette fois point de délai : la caisse fut débarquée, solidement clouée et en bon état apparent. On l’ouvrit, pour y trouver toutes les vitres « en miettes ». Pas un fragment de verre ne pouvait servir. L’année suivante, le père n’osa plus écrire, attendu que le coût des vitres cassées avait fait un trop grand vide dans son allocation, et qu’il avait des articles plus importants à demander. Heureusement, Mgr Clut vint à passer, en route pour l’Alaska ; et, touché de la misère du missionnaire, il lui promit qu’il lui apporterait, à son retour, des vitres qu’il comptait obtenir d’un brave Canadien-Français, M. Mercier, commis du fort Youkon. Mgr Clut repassa par Good-Hope, le printemps suivant, avec la nouvelle que les vitres, données en effet par M. Mercier, avaient été emportées très loin dans les montagnes Rocheuses, mais qu’un matin, au lever précipité du campement, on les avait oubliées ; et que l’on n’avait remarqué leur absence que l’après-midi, après avoir sauté un grand nombre de rapides qu’il était impossible de remonter. Mgr Clut voulut réparer cette déconvenue en envoyant un ordre pressant au lac la Biche. Il gagna une année, car, deux ans après, Mgr Faraud remettait les vitres au Père Ducot, qui se rendait à Goop-Hope, avec la prescription très appuyée de ne pas les perdre de vue une seule minute, et de les porter lui-même, de ses propres mains, à tous les lieux de déchargement et de rechargement.